Exklusiv: Interview mit dem in Ägypten verhafteten Schweizer Journalisten

Bei Ausschreitungen zwischen Bauern und der Polizei bei Azbar Mersha ist der Korrespondent der Genfer Zeitung «Le Courrier» sowie 4 weitere Journalisten vorübergehend in Haft gekommen. Verhaftet und angeklagt wurden weiter über 20 Bauern. NGOs in der Schweiz haben beim ägyptischen Botschafter gegen die «brutalen» Festnahmen protestiert. presseverein.ch hat den frei gelassenen Korrespondenten Gregoire Duruz in Kairo erreicht und per e-Mail interviewt.

pv.ch: Comment allez-vous maintenant?
Duruz: Bien. En fait, contrairement à 2 de mes collègues, je n’ai pas été brutalisé par la police. Mais, c’est vrai que ce qui s’est passé donne à réfléchir. Je continue d’y penser régulièrement.

Qu’est ce qui s’est passé exactement?
Nous étions dans les champs depuis 3 heures, en compagnie d’une centaine de paysans et de 300-400 policiers. Nous étions juste là pour observer ce qui allait se passer entre les paysans protestataires et les forces de l’ordre. Subitement, après plusieurs tentatives d’intimidation et demandes de les suivre, des policiers en civil m’ont encadré et emmené de force avec eux. Derrière moi, mes 3 collègues ont eux aussi été interpellés. Des paysans ont alors commencé à réagir et immédiatement, les policiers anti-émeute ont donné l’assaut, avec gaz lacrymogène et coups de bâton.

Qui étaient les autres journalistes?
Il y avait avec moi 2 Français (dont un photographe de plus de 60 ans) et un Belge. Nous étions 4 journalistes étrangers. Plus tard, nous avons appris qu’un journaliste égyptien était également présent, qu’il avait aussi été arrêté puis relâché.

Que voulait savoir la police?
C’est cela le plus déroutant. Nous n’avons même pas subi d’interrogatoire. Nous avons juste perdu du temps. A mon avis, les forces de l’ordre n’ont pas agi avec stratégie. Elles étaient essentiellement gênées par notre présence et voulaient nous éloigner du terrain.

Comment la police vous a traité?
Bien. Simplement, on nous a empêché d’utiliser nos téléphones portables, et toutes les photos qui avaient été prises ont été effacées soigneusement! Souvent, les policiers qui ont affaire à des étrangers et qui exécutent des ordres venus d’en haut ne sont pas méchants. Au contraire, ils veulent discuter et comprendre. Le problème est que rien ne fonctionne par le raisonnement mais selon l’arbitraire des décisions prises par les supérieurs.
Cela dit, la situation est beaucoup plus tragique en ce qui concerne les collègues journalistes égyptiens. Eux n’ont pas la chance d’avoir un passeport étranger, du coup ils sont très souvent malmenés et battus en prison.

Que pensez-vous de tout cela?
C’est difficile d’imaginer comment une pareille situation aurait été gérée par la police il y a dix ans, par exemple. Mais ce qui est sûr, c’est que depuis que le président Moubarak a décidé d’«ouvrir» le jeu démocratique en février 2005, la situation est devenue électrique en Egypte. L’opposition se fait de plus en plus entendre, les autorités paraissent dépassées et font tout pour contenir les manifestations de révolte. La protestation populaire passe par des phases plus ou moins active. Les derniers mois d’avril et de mai ont été très animés, avec plusieurs milliers de manifestants qui ont régulièrement occupé le centre-ville du Caire en soutien a 2 juges qui étaient poursuivis pour avoir dénoncé des fraudes lors des dernières élections.
Même si le gouvernement contrôle encore complètement l’espace public, une sorte de processus de „contestation démocratique“ est définitivement en marche. Et la police réagit comme elle peut, sans grande concertation et dans l’urgence.

Quelles sont les conséquences pour vous et votre travail?
Pour l’instant, je n’ai rien remarqué. C’est ce qui me fait dire que notre interpellation s’est effectuée un peu dans l’urgence, sans vraiment de planification ni stratégie rigoureuses. Quand il faut, la police chasse les journalistes et détruit leurs photos, mais cela s’arrête là.

Depuis quand êtes-vous en Egypte?
J’habite le pays depuis 2004. Je le trouve passionnant. Il y a énormément de choses à dire. Et en même temps, imaginer l’avenir de l’Egypte est déprimant. C’est dur d’imaginer la possibilité d’un changement, d’une amélioration du niveau de vie de la population, tellement celle-ci est nombreuse: aujourd’hui, on estime le nombre d’Egyptiens à 73 millions.

Vous resterez et continuerez à écrire sur le pays?
Pour un petit moment encore, car j’ai le projet de revenir en Suisse dès l’automne prochain. Ce n’est pas facile d’être free-lance et d’intéresser tous les jours les media suisses!